Visites au fil de l'Art
Un après-midi à Vaux-le-Vicomte
Je dois faire un aveu: je n'avais jamais visité le château de Vaux-le-Vicomte avant ce lundi 1er novembre. Honte sur moi, sans doute!
Je ne sais même pas pour quelles raisons je n'y étais jamais allée: la distance, très certainement, et la difficulté d'y arriver en transports en commun...parce que oui, c'est très difficile d'y parvenir depuis Paris quand on n'est pas motorisé.
Mais voilà, le 1er novembre, entre deux énormes averses, ça y est, j'ai enfin visité la demeure de Fouquet. Et je n'ai pas été déçue!

Le château est vraiment magnifique, sa silhouette incomparable permettant d'apprécier le savoir-faire naissant des futurs créateurs de Versailles.
L'harmonie des proportions du bâtiment et celle des jardins produisent un effet majestueux. Il suffit de se placer au point de vue sur la perspective de la transparence pour se rendre compte de la perfection du travail de Le Nôtre: le regard embrasse la totalité du domaine, en traversant le château, et se perd jusqu'à la statue gigantesque d'Hercule, quelque 1250 mètres plus loin!
Avant même d'entrer dans le château, le visiteur peut déambuler dans les anciennes écuries, devenues Musée des Equipages. Y sont réunies un bon nombres d'attelages de toutes époques, bien entretenue, malgré la poussière qui s'accumule sur les mannequins.
Moi qui ait eu l'occasion de faire des visites au Musée de la voiture et de l'automobile à Compiègne, je dois dire que ce petit musée offre un condensé très sympathique du passage de la voiture attelée à l'auto.
La mise en scène et en son du château est tout à fait pertinente: un audioguide est proposé gratuitement, qui nous plonge au XVIIe siècle. Nicolas Fouquet et ses proches nous narrent la création du château, l'ascension et la chute du surintendant et bien sûr la fêtes fatale et le procès.
Tout ceci alors que nous déambulons dans des salles très meublées, présentant des informations complémentaires sur l'histoire des lieux, le mobilier et les tableaux.
Et quel décor! Chacune des pièces offre un ensemble de mobilier et d'oeuvres cohérent, venant parfaire les propos des protagonistes de l'histoire. Ce cheminement à travers salles de réception, salles privées et pièces pour les domestiques est très agréable.
Par ailleurs, des panneaux explicatifs permettent de découvrir la provenance du mobilier, et de saisir la totalité de l'histoire des lieux: en effet, le château de Vaux-le-Vicomte a connu d'autres prestigieux propriétaires que la famille de Fouquet.
En plus du parcours principal, il est possible, moyennant quelques euros supplémentaires, de monter sur le dôme. Au passage, la charpente que l'on y découvre est à couper le souffle, que l'on soit amateur de belles poutres ou pas. On ne peut y rester insensible.
L'ascension est très courte, et relativement accessible à tous (si ce n'est le petit escalier à la fin, très étroit et un peu raide). Une fois les quelques marches gravies, on perçoit la magie de Vaux-le-Vicomte: ses jardins de Le Nôtre, une pure merveille!

En redescendant, une série de pièces d'apparat restent à voir, toutes aussi richement meublées les unes que les autres, et notamment la chambre du roi, dans laquelle le nœud de l'intrigue se joue: l'audiophone nous donne à vivre le moment où Louis XIV prend ombrage de la fortune de Fouquet, et décide de sa perte. Il "rendra gorge"!
Un bien bel espace pour une scène si tragique!
C'est ainsi que l'on sort du château émerveillé et plus informés sur le fameux procès de Fouquet, sans être tombé, selon moi, dans des travers de mise en scène vus ailleurs.
En route donc pour un tour somme toute assez rapide des jardins, qui paraissent "à taille humaine" selon le souhait de leur concepteur, mais qui sont en réalité plus vastes qu'il y paraît. Car Vaux-le-Vicomte a été le premier terrain de jeu d'André Le Nôtre, comme des ses comparses Le Vau et Le Brun, avant de se voir confier les jardins du roi à Versailles. Et ici, dans la Seine-et-Marne, Le Nôtre a pu laisser libre cours à son imagination, servi qu'il était par un terrain aux déclivités abondantes et utiles.
Ici, Le Nôtre donne toute la mesure de son génie: l'illusion est portée à son paroxysme. Jeux de perspectives aériennes, raccourcies, accélérées, ralenties... tout y est. Tout ce qui donne l'impression d'être aisé, alors que l'on sent que cela a demandé des calculs savants. Toute la maîtrise de la nature qui fait la perfection des jardins à la française y est déployée.
Le végétal, le minéral et l'eau se mêlent pour provoquer l'émerveillement du visiteur. On comprend mieux pourquoi le jeune Louis XIV, bien que possédant de nombreux château, ait ressenti quelque jalousie à l'égard de ce surintendant qui affiche fièrement sa réussite, et surtout, qui donne les moyens aux plus prometteurs des hommes d'art de la faire éclater aux yeux de tous.
Décidément, Vaux-le-Vicomte est bien plus que le domaine qui anticipe le château de Versailles. C'est un véritable joyau inachevé, dans lequel ceux qui ont donné forme au style du Grand Siècle ont pu rêver puis donner vie à leurs rêves.
Bien sûr, Versailles est plus grandiose, plus abouti, plus grandiloquent, mais Vaux est l'étape indispensable pour le comprendre. Le monument à visiter pour saisir l'harmonie que trois hommes ont amenée à sa perfection: Le Vau, Le Brun et Le Nôtre, les grands architectes de la grandeur du Roi Soleil.
Oui, vous l'aurez compris, je vous encourage très chaudement à aller visiter le château de Vaux-le-Vicomte (et oui, j'envisage de proposer quelque chose sur Le Nôtre....un jour...).
Ce post est dédié à mon père,
Mélanie